Le Cannabis dans l’Histoire Chinoise
Dans les annales de la Chine antique, le cannabis émerge souvent comme un élément central, remplissant des rôles médicinaux, rituels et industriels. Désigné par le terme « ma » en mandarin, le cannabis fait l’objet de discussions dans des écrits médicinaux anciens tels que le « Shennong Ben Cao Jing » (Le Traité de Phytothérapie de Shennong). Ces manuscrits soulignent ses qualités apaisantes et antidouleur, témoignant de sa pertinence médicinale
Sa présence ne s’arrête pas à la médecine. Il est également évoqué dans des contextes religieux, apparaissant comme une offrande lors de rites funéraires et dans des cérémonies taoïstes.
Par ailleurs, les propriétés robustes de la variété de chanvre du cannabis étaient exploitées pour confectionner des textiles, des cordes et divers objets du quotidien. Les fouilles archéologiques en territoire chinois ont révélé des articles anciens, attestant de l’utilisation prédominante du chanvre.
Avec un tel héritage historique, comment la Chine moderne, à l’heure des débats internationaux sur le cannabis, traite-t-elle cette plante aux multiples facettes.
Régulation et législation actuelles sur le cannabis en Chine
La République populaire de Chine adopte une politique générale de tolérance zéro en matière de drogues, et le cannabis ne fait pas exception. La possession, consommation et vente de cannabis à des fins récréatives sont strictement interdites. Les fumeurs de marijuana, s’ils sont pris, seront détenus pendant 10 à 15 jours et peuvent être condamnés à une amende maximale de 2 000 Yuans, équivalant à 252 Euros. De plus, en vertu de la loi chinoise, quiconque est surpris en possession de plus de 50 grammes de cannabis risque la peine de mort. Même pour des quantités moindres, les individus peuvent encourir de lourdes peines de prison.
La législation chinoise distingue le THC du CBD. Si le THC est strictement interdit, le CBD (cannabidiol) – un composant non psychoactif du cannabis – est plus accepté, bien qu’encadré.
Les étrangers en Chine sont également soumis à ces lois strictes. Ils peuvent être arrêtés, expulsés ou subir des tests de dépistage de drogues sans préavis. Bien que la Chine n’ait actuellement aucun projet de légalisation ou de décriminalisation du cannabis à des fins récréatives, l’intérêt croissant pour le chanvre industriel et le CBD pourrait éventuellement mener à des réformes législatives
Industrie du cannabis et du chanvre industriel en Chine
La Chine, bien que rigide en ce qui concerne la possession et la consommation récréatives de cannabis, se distingue sur le plan international par sa domination dans le secteur du chanvre industriel. Cultivé essentiellement pour ses fibres solides et ses graines nutritives, le chanvre trouve une place dans diverses industries, allant de la mode à l’alimentation. Les fibres, transformées en textiles résistants, alimentent l’industrie vestimentaire, tout en jouant un rôle croissant dans la production de bioplastiques écologiques et de matériaux de construction durables. Les graines, riches en protéines et en acides gras essentiels, sont valorisées pour leur potentiel nutritionnel.
Sur le front de l’innovation, la Chine est une force à reconnaître, détenant plus de la moitié des brevets mondiaux pour les produits dérivés du cannabis. Les laboratoires chinois, à la pointe de la technologie, explorent continuellement les potentielles applications de cette plante ancienne, élargissant les horizons de son utilisation. Parallèlement, le marché du CBD en Chine est en plein essor. Bien qu’encadré par des réglementations strictes, le CBD, lorsqu’il est extrait du chanvre industriel, trouve sa place dans des domaines tels que les cosmétiques, les compléments alimentaires et la médecine, bénéficiant de ses prétendus effets anti-inflammatoires et apaisants. En outre, bien que limité, l’usage du cannabis en médecine en Chine est ancré dans la tradition. Des teintures aux pommades, les dérivés du cannabis sont intégrés dans la pharmacopée chinoise, attestant d’une fusion entre des méthodes traditionnelles et des avancées contemporaines.
En écho à cette tendance, plusieurs marques chinoises se sont distinguées par leur utilisation innovante du chanvre comme matière première. Parmi elles :
- Hemp Fortex : Spécialisée dans la fabrication et l’exportation de textiles et de vêtements en chanvre, cette entreprise propose une gamme de produits écologiques, durables et confortables. Qu’il s’agisse de t-shirts, jeans, robes, pulls ou vestes, Hemp Fortex marie élégance et conscience écologique.
- Hemp Hoodlamb : Positionnée sur le créneau de la mode urbaine, cette marque combine chanvre et coton biologique pour créer des vêtements aux designs innovants. Des poches secrètes aux capuches doublées de fausse fourrure, chaque pièce est pensée pour allier style et fonctionnalité.
- Hanfeng : Allant au-delà du textile, cette société se consacre à la production et à la commercialisation de produits alimentaires dérivés des graines de chanvre. Avec une gamme allant de l’huile au chocolat, en passant par le lait, le thé et le vin, Hanfeng promeut activement lesbienfaits nutritionnels et médicinaux du chanvre auprès du public chinois.
Enquêtes et Opinions sur le Cannabis et le Chanvre en Chine
La perception du cannabis en Chine se situe à l’intersection des politiques gouvernementales strictes, des valeurs culturelles profondément ancrées et des attitudes changeantes face à la mondialisation et à l’innovation.
Traditionnellement, le cannabis a été stigmatisé en Chine comme une substance nocive, en grande partie à cause des campagnes massives du gouvernement visant à diaboliser son utilisation. Cette diabolisation est si prononcée que la plupart des Chinois évitent d’aborder le sujet, le considérant comme tabou.
Cependant, une enquête menée par l’Université de Pékin en 2019 a permis d’éclairer certaines des attitudes du public chinois à cet égard. Selon cette étude, seulement 5,1% des Chinois ont déjà expérimenté le cannabis, un chiffre bien inférieur à celui d’autres pays tels que les États-Unis ou la France. Parmi ceux qui l’ont essayé, la curiosité était le principal moteur, suivie de l’utilisation pour la détente ou le soulagement de la douleur.
Quand il s’agit de légalisation, la majorité des Chinois semblent réticents à soutenir la légalisation du cannabis récréatif, avec 58,3% s’y opposant. En revanche, l’opinion publique est plus divisée en ce qui concerne le cannabis médical, près de la moitié des personnes interrogées soutenant sa légalisation. Cela peut être vu comme un reflet de l’histoire riche et complexe de la Chine avec les plantes médicinales et la pharmacopée traditionnelle.
Il est intéressant de noter que le chanvre industriel, distinct du cannabis psychoactif, bénéficie d’une acceptation plus large. Sa réputation non controversée et son utilisation dans divers produits allant des textiles à la nourriture, en passant par les cosmétiques, font de lui une exception notable dans le débat sur le cannabis en Chine.
Tradition et Potentiel Global du Cannabis
Alors que le monde avance à grands pas vers une acceptation et une régulation de plus en plus sophistiquées du cannabis, tant sur le plan récréatif que médical, la Chine se trouve à une croisée des chemins. La recherche sur le cannabis médical, bien que prometteuse à l’échelle mondiale, est en Chine soumise à des restrictions strictes et à une surveillance gouvernementale rigoureuse.
La prudence de la Chine à l’égard de la libéralisation du cannabis thérapeutique ou récréatif est compréhensible, compte tenu de ses politiques intérieures et de ses valeurs culturelles. Néanmoins, l’énorme potentiel économique du marché du cannabis ne peut être ignoré. Avec sa position dominante dans l’industrie du chanvre, la Chine est parfaitement placée pour prendre les devants en matière de développement et de commercialisation de produits à base de CBD et d’autres cannabinoïdes. Cette initiative, toutefois, exigerait une navigation habile pour s’assurer que tout produit lancé sur le marché est conforme non seulement aux normes légales strictes de la Chine, mais aussi aux standards internationaux.
Alors que plusieurs pays, notamment le Canada, les États-Unis, l’Uruguay et plusieurs nations européennes, ont adopté des approches plus libérales en matière de législation sur le cannabis, la Chine a l’opportunité unique d’observer, d’apprendre et, éventuellement, d’adapter ces modèles à ses propres besoins et circonstances. Ces pays offrent des études de cas précieuses sur les impacts socio-économiques, les défis réglementaires et les avantages potentiels de la légalisation du cannabis.
En conclusion, bien que la Chine maintienne actuellement une approche conservatrice en matière de législation sur le cannabis, l’évolution rapide de la situation internationale et les opportunités économiques potentielles pourraient la pousser à réévaluer sa position dans les années à venir. Seul le temps nous dira si la Chine choisira de s’aligner sur la tendance mondiale ou de forger son propre chemin dans le paysage complexe du cannabis.